Los estudiantes de CPGE 2 Espagnol spécialité propusieron un taller de traducción a los estudiantes LSH LVA alrededor de Maurice Ravel y Manuel de Falla cuyas obras se interpretaron en un concierto al que asistieron en La Halle aux Grains el 10.01. Los talleres se organizaron los lunes 13 y 20 de enero.
Article intégral EN TORNO A MANUEL DE FALLA
THEME SPECIALITE A GRENADE AVEC MANUEL DE FALLA
L’après midi du dimanche il y a tertulia chez Don Manuel. La plupart de nos amis communs, entre autres Don Fernando de los Ríos[1], depuis un grand personnage du nouveau régime, y accouraient. Comme on peut bien le penser, ce n’était pas la politique qui nous occupait, c’étaient des souvenirs, littéraires ou personnels, des voyages, des projets d’embellissements pour Grenade, telle trouvaille chez des fripiers, jusqu’à ce que, à la requête générale, Don Manuel se mît au piano. Tous les virtuoses qui, de par le monde, jouent sa musique en brillant auraient bien dû être parmi nous.
Peut-être y aurait-il eu quelqu’un à être éclairé par « ces étincelles jaillies du silex », ainsi que dit Paul Valéry de cette musique. Feu subtil, feu pur : l’image convient à l’auteur du Cimetière Marin. Hélas ! Rien qu’à voir le musicien de Grenade, nous ne pouvons nous empêcher de penser qu’elle renchérit un peu sur la vérité. La musique de Falla, cette musique qui nous fascine contre la flamme et nous exalte comme elle, qui chante pour nous, non plus comme la mer pour le poète, mais bien l’évanouissement de « l’âme consumée », cette musique n’est pas un feu sans aliment : elle vit de son auteur, elle l’use et le dévore. La figure de Falla, si mince, si émaciée, nous apparaît de plus en plus réduite en strict support d’une âme. Nous voudrions croire que c’est la maladie qui le mine ainsi. La maladie, il y a toujours recours contre elle. Mais au mal secret qui a nom sublimité, quel remède ? Falla nous en voudra de déceler ce mal ou du moins de lui donner un nom. Ou plutôt, non, il ne nous en voudra pas : il s’en voudra.
Il y a des moments où nous nous demandons si l’artiste assez pur, assez oublieux de soi pour regretter que l’œuvre d’art ne soit point anonyme et pour le souhaiter, ne se reproche pas d’être l’occasion de tant de joie et de tant d’enthousiasme. Et nous ne jurerions pas que, dans le fond de son cœur, de son cœur de croyant, il n’en demande pas pardon à Dieu.
Si quelqu’un, après cela, l’imaginait replié, vivant dans sa retraite à l’écart et à l’abri du monde, il se tromperait fort. Jamais l’expression « d’écho sonore » appliquée à un artiste, n’a été plus vraie, plus littéralement vraie. Ah si seulement cette communication de Manuel de Falla avec le dehors n’était qu’esthétique ! S’il savait, s’il pouvait rester impassible ! Mais il ne peut pas. Devant une qualité d’âme si haute, devant une conscience qui donne le pas sur l’humain à tout autre intérêt, fût-ce la création artistique, on demeure confondu à la fois de vénération et de regret.
Mathilde Pomès, La Revue Musicale n°145, 1934.
[1] Originaire de la province de Grenade, grand ami de Falla et García Lorca. Homme politique, député socialiste et successivement Ministre de la Justice, de l’Education et de l’Intérieur dans les premiers gouvernements de la II République Espagnole entre 1931 et 1933.
THEME SPECIALITE A GRENADE AVEC MANUEL DE FALLA
L’après midi du dimanche il y a tertulia chez Don Manuel. La plupart de nos amis communs, entre autres Don Fernando de los Ríos[1], depuis un grand personnage du nouveau régime, y accouraient. Comme on peut bien le penser, ce n’était pas la politique qui nous occupait, c’étaient des souvenirs, littéraires ou personnels, des voyages, des projets d’embellissements pour Grenade, telle trouvaille chez des fripiers, jusqu’à ce que, à la requête générale, Don Manuel se mît au piano. Tous les virtuoses qui, de par le monde, jouent sa musique en brillant auraient bien dû être parmi nous.
Peut-être y aurait-il eu quelqu’un à être éclairé par « ces étincelles jaillies du silex », ainsi que dit Paul Valéry de cette musique. Feu subtil, feu pur : l’image convient à l’auteur du Cimetière Marin. Hélas ! Rien qu’à voir le musicien de Grenade, nous ne pouvons nous empêcher de penser qu’elle renchérit un peu sur la vérité. La musique de Falla, cette musique qui nous fascine contre la flamme et nous exalte comme elle, qui chante pour nous, non plus comme la mer pour le poète, mais bien l’évanouissement de « l’âme consumée », cette musique n’est pas un feu sans aliment : elle vit de son auteur, elle l’use et le dévore. La figure de Falla, si mince, si émaciée, nous apparaît de plus en plus réduite en strict support d’une âme. Nous voudrions croire que c’est la maladie qui le mine ainsi. La maladie, il y a toujours recours contre elle. Mais au mal secret qui a nom sublimité, quel remède ? Falla nous en voudra de déceler ce mal ou du moins de lui donner un nom. Ou plutôt, non, il ne nous en voudra pas : il s’en voudra.
Il y a des moments où nous nous demandons si l’artiste assez pur, assez oublieux de soi pour regretter que l’œuvre d’art ne soit point anonyme et pour le souhaiter, ne se reproche pas d’être l’occasion de tant de joie et de tant d’enthousiasme. Et nous ne jurerions pas que, dans le fond de son cœur, de son cœur de croyant, il n’en demande pas pardon à Dieu.
Si quelqu’un, après cela, l’imaginait replié, vivant dans sa retraite à l’écart et à l’abri du monde, il se tromperait fort. Jamais l’expression « d’écho sonore » appliquée à un artiste, n’a été plus vraie, plus littéralement vraie. Ah si seulement cette communication de Manuel de Falla avec le dehors n’était qu’esthétique ! S’il savait, s’il pouvait rester impassible ! Mais il ne peut pas. Devant une qualité d’âme si haute, devant une conscience qui donne le pas sur l’humain à tout autre intérêt, fût-ce la création artistique, on demeure confondu à la fois de vénération et de regret.
Mathilde Pomès, La Revue Musicale n°145, 1934.
[1] Originaire de la province de Grenade, grand ami de Falla et García Lorca. Homme politique, député socialiste et successivement Ministre de la Justice, de l’Education et de l’Intérieur dans les premiers gouvernements de la II République Espagnole entre 1931 et 1933.
Article intégral EN TORNO A MANUEL DE FALLA