Introduction
Avant d’en venir au sujet de cette conférence, c’est-à-dire le rôles des objets dans la dramaturgie, je ferai un petit détour par la philosophie médiévale et la question du langage. Au début du XIVe s, le philosophe franciscain Guillaume d’Ockham soutient la thèse, que nous appelons « nominaliste », selon laquelle les concepts abstraits universaux, tels que « humanité », « beauté », « justice » ne sont que des termes conventionnels qui ne renvoient à aucune entité réelle. Si « mourir » est un événement bien attesté dans la vie humaine, « la mort », en soi, n’existe pas. Ce n’est qu’un mot. Autrement dit, le langage, en formant des noms pour désigner des idées abstraites, nous trompe en nous faisant imaginer des êtres purement illusoires. Parler de la mort nous conduit à nous représenter une chose terrifiante, qui prend par exemple la forme d’un squelette malveillant, armé d’une grande faux. Le langage donc nous trompe et nous fait croire en des chimères. Le langage est source d’illusion. D’une certaine manière les mots sont comme des billets de banques dont la valeur, théoriquement, devrait renvoyer à une somme équivalente en lingots d’or conservée dans les coffre de la banque centrale. Or, de même qu’il est très facile de faire tourner la planche à billets et de produire des bouts de papier qui ne renvoient à aucune espèce sonnante et trébuchante. Le langage produit également une inflation de mots, qui peuvent être détachés de toute référant réel. Certains mots donc, sont de la fausse monnaie.
Pour élargir cette question de la validité du langage, on voit bien que le problème est qu’il permet de dire ce qui n’est pas comme si cela était, de faire exister dans notre esprit des choses qui n’existent pas dans la réalité. Pour le dire plus simplement, le langage peut-être la source de deux formes d’illusion: l’erreur, si l’illusion est involontaire ; ou le mensonge, si l’illusion est créée intentionnellement.
Au XVIIIe s, un savant imaginaire, rencontré par Gulliver lors de sa visite de l’Académie de Lagado , propose une solution radicale pour remédier à ce problème : il suffit de supprimer le langage et de s’exprimer en montrant les choses elles-mêmes que l’on sortirait de sa proche ou d’un grand sac à dos :
« L’autre allait plus loin, et proposait une manière d’abolir tous les mots, en sorte qu’on raisonnerait sans parler ; ce qui serait très-favorable à la poitrine, parce qu’il est clair qu’à force de parler les poumons s’usent et la santé s’altère. L’expédient qu’il trouvait était de porter sur soi toutes les choses dont on voudrait s’entretenir. Ce nouveau système, dit-on, aurait été suivi, si les femmes ne s’y fussent opposées. Plusieurs esprits supérieurs de cette académie ne laissaient pas néanmoins de se conformer à cette manière d’exprimer les choses par les choses mêmes, ce qui n’était embarrassant pour eux /, que lorsqu’ils avaient à parler de plusieurs sujets différents ; alors il fallait apporter sur leur dos des fardeaux énormes, à moins qu’ils n’eussent un ou deux valets bien forts pour s’épargner cette peine : ils prétendaient que, si ce système avait lieu, toutes les nations pourraient facilement s’entendre (ce qui serait d’une grande commodité), et qu’on ne perdrait plus le temps à apprendre des langues étrangères. » (Jonathan Swift, Les Voyages de Gulliver, « Voyage à Laputa, aux Balnibarbes etc. », chapitre V, visite de l’Académie de Lagado)
Certes la méthode est un peu encombrante, car il est peu commode de sortir une baleine de sa poche pour parler de baleine mais elle a l’avantage de supprimer l’erreur et le mensonge. « Les choses ne mentent pas » pourrait-on dire, en pastichant Philippe Pétain.
Il se trouve que cette question du rapport entre les mots et les choses est au cœur de la théâtralité, puisque le théâtre, comme chacun sait, met en scène des mots, mais aussi des acteurs en chair et en os qui évoluent sur la scène en manipulant des objets. Comment donc le théâtre pense-t-il le rapport des mots et des choses ?
I- L’illusion des mots, le poids des objets
Il semble d’abord que le théâtre a toujours donné raison, par avance, aux académiciens de Lagado. Le théâtre n’a eu de cesse de démontrer la facticité des mots : comme le dit Hamlet : « Words, words, words ». Dans La Nuit des Rois (acte III, sc 1) de Shakespeare, le bouffon Feste déclare qu’il n’est pas le fou de Lady Olivia, mais son « corrupteur de mots » car dit-il « une phrase n’est qu’un gant de chevreau pour un esprit agile », un gant que l’on peut retourner sens dessus dessous. Dans L’Illusion comique de Corneille (II, 3), Isabelle réplique à un amoureux éconduit qui la pourchasse de ses serments d’amours plaintifs et de s es reproches :
« Nous donnons bien souvent de divers noms aux choses,
Des épines pour moi vous les nommez des roses,
Ce que vous appelez service, affection
Je l’appelle supplice et persécution. »
Si au départ ces vers d’Isabelle ne semblent désigner que la diversité des points de vue, très vite, Adraste, s’entêtant à déclarer qu’Isabelle ne peut qu’être flattée de ses avances, corrompt sciemment le langage en lui faisant dire le contraire de la vérité : il nomme volontairement « roses » ce qu’il sait n’être qu’« épines ».
Le théâtre souvent illustre cette tromperie des mots. L’erreur peut être involontaire, comme dans le cas du quiproquo où un même mot est compris de façon radicalement différente par les personnages qui croient pourtant parler de la même chose. Le procédé est connu, mais je ne résiste pas à l’envie vous montrer un passage célèbre de L’Ecole des femmes, où vous reconnaîtrez une célèbre actrice à ses débuts : Isabelle Adjani face à Bernard Blier dans L’Ecole des femmes, film de Raymond Rouleau, https://www.cyrano.education/content/lecole-des-femmes-42994, de 31.43 à 32.26.
Les mots sont aussi le véhicule du mensonge le plus élémentaire : dans l’Electre de Sophocle, le Pédagogue trompe Clytemnestre et tout le palais de Mycènes en racontant la mort d’Oreste, avec beaucoup de détails réalistes qui donnent l’apparence de la vérité à son récit, alors que tout y est faux.
Le cas du langage à double entente illustre de façon plus subtile la corruption des mots : toujours dans Electre, lors de la scène finale, le cadavre de Clytemnestre assassinée est exposé devant tous, mais voilé. Egisthe s’approche du corps qu’il croit être celui d’Oreste et il interroge brutalement Electre. Celle-si répond alors à l’amant de sa mère de façon apparemment soumise mais ironiquement tragique, puisqu’elle lui annonce à mots couverts qu’il va bientôt être assassiné à son tour. Projection d’Electre, mise en scène d’Antoine Vitez, réalisation Hugo Santiago, 1986, DVD Trois fois Electre, La Maison d’à côté, Imec, INA Editions, de 1.33.21 à 1.33.41 :
Egisthe : Qui de vous sait où se trouvent ces étrangers de Phocide qui sont venus annoncer qu’Oreste est mort dans un accident de char ? Réponds-moi. Oui, toi qui faisais l’effrontée autrefois. J’imagine que la chose t’intéresse, que tu sais cela.
Electre : Oui, je sais tout. Comment faire autrement ? C’est ce que j’ai de plus cher au monde.
Egisthe : Eh bien où sont-ils ces étrangers, enseigne-moi ?
Electre : Dans la maison, ils ont été reçus en amis.
Egisthe : Ils ont vraiment annoncé la mort d’Oreste ?
Electre : Non, ils l’ont prouvée, autrement que par des mots.
Egisthe : Alors je peux en être sûr ?
Electre : Tu peux même voir, mais c’est un pénible spectacle.
(Sophocle, Electre, exodos, traduction d’Antoine Vitez)
De façon plus perverse encore, Iago trompe Othello en ne lui disant que la plus stricte vérité :
« Oh prenez garde monseigneur, à la jalousie ! C’est le monstre aux yeux verts qui produit l’aliment dont il se nourrit ! Ce cocu vit en joie qui, certain de son sort, n’aime pas celle qui le trompe ; mais, oh ! Quelles damnées minutes il compte, celui qui raffole, mais doute, celui qui soupçonne, mais aime éperdument ! » (traduction François-Victor Hugo)
C’est en effet en lui peignant les effets néfastes et bien réels de la jalousie que Iago distille dans l’esprit d’Othello l’idée que Desdémone pourrait lui être infidèle. Il le rend jaloux en le mettant en garde contre la jalousie !
On voit donc bien que le langage est source d’illusion, qu’il s’agisse d’erreur involontaire ou de tromperie caractérisée. Le langage au théâtre se trouve donc souvent décrédibilisé. Ainsi, dans la comédie de Corneille, Le Menteur, le héros est un mythomane qui s’enferre tellement dans ses mensonges, qu’à la fin plus personne ne veut le croire, même quand il dit la vérité.
La solution passera donc par les objets, dont la matérialité apporte une preuve concrète et un témoignage irréfutable de la vérité. Ainsi dans la scène de reconnaissance, théorisée par Aristote, il faut le plus souvent recourir à un objet pour mettre fin à l’illusion. Dans Electre, toujours, lorsqu’Oreste révèle sa vraie identité à sa sœur, il doit exhiber sous ses yeux le sceau d’Agamemnon pour qu’elle accepte enfin de le croire : « Regarde cette bague de notre père, et tu sauras si je dis vrai ». C’est la première d’une longue série d’interjections (« oh ! mais c’est la croix de ma mère ! ») qui permettront de mettre fin commodément aux intrigues les plus complexes, des comédies de Molière jusqu’aux meilleurs mélodrames du XIXe s. « Hélas ! À voir ce bracelet, c’est ma fille que je perdis à l’âge que vous dites », s’écrie Argante reconnaissant Zerbinette pour sa fille à la fin des Fourberies de Scapin.
II- Les objets nous trompent
Pourtant les objets eux-aussi peuvent être trompeurs. Tout comme les mots, les objets sont d’abord source d’erreur involontaire et de quiproquo : dans la tragique histoire de Pyrame et Thisbé, que Shakespeare met en scène de façon parodique dans Le Songe d’une nuit d’été, les deux amants séparés par l’hostilité de leurs familles s’enfuient de chez eux et se donnent rendez-vous dans une clairière. Thisbé arrive en premier, mais se retrouve nez à nez avec un lion. Dans sa fuite elle laisse tomber son écharpe que le lion déchiquette à belles dents avant de quitter la place. A son arrivée, Pyrame trouve l’écharpe déchirée. Il imagine aussitôt Thisbé morte et il se suicide. Lorsque Thisbé revient sur ses pas, il ne lui reste plus qu’à se se suicider à son tour. Dans Roméo et Juliette, l’écharpe est remplacée par un somnifère qui donne à Juliette l’apparence de la mort, et par une lettre qui devait prévenir Roméo et qui arrive trop tard.
Les objets peuvent aussi mentir sciemment ou être manipulés : c’est ainsi que le Pédagogue et Oreste, dans Electre, appuient le récit mensonger de la mort d’Oreste en produisant une urne funéraire censée contenir les cendres du fils d’Agamemnon. De même Iago apporte à Othello la preuve ultime, mais trompeuse, de l’infidélité de Desdémone, en dérobant à cette dernière un mouchoir qui se retrouve comme par hasard entre les mains de Cassio. Bref, si Electre avait été baroque, elle se serait méfiée du sceau d’Agamemnon brandi par Oreste : si une urne pouvait lui mentir, pourquoi une bague serait-elle moins douteuse ?
Les objets ne mentent pas, disions-nous ? C’est donc une illusion dont nous devons nous débarrasser. Leur matérialité est trompeuse, et leur prétendue objectivité dissimule mal le fait que les objets sont profondément subjectifs.
III Les objets sont subjectifs
Dans une conférence intitulée « Sémantique de l’objet » (1964), Roland Barthes explique qu’ « il y a toujours un sens qui déborde l’usage de l’objet ». En effet la signification d’une Rolex ne se limite pas à son usage qui est de donner l’heure. La Rolex est surtout un signe qui sert à transmettre un message : c’est un moyen pour son possesseur d’affirmer sa richesse et sa réussite sociale. De même au théâtre, il y a toujours de l’humain qui déborde de l’objet.
Les objets au théâtre caractérisent leur possesseur, mieux qu’une longue description romanesque ne pourrait le faire. Ainsi dans Mademoiselle Julie de Strindberg, le fait que le valet Jean ne boive que du vin de Bourgogne, nous renseigne sur ses prétentions à l’élévation sociale, tandis que le fait que l’aristocrate Julie déclare préférer la bière, nous renseigne sur son désir de « faire peuple » et sa fascination trouble pour la déchéance sociale. Plus spectaculaire encore, au dénouement de la pièce, Jean prévoit de s’enfuir en enlevant Julie, avec qui il a couché ; mais il suffit d’un coup de sonnette et de la vue des bottes de Monsieur, le père de Julie, pour que le valet soit renvoyé à sa condition d’esclave et se retrouve soudain paralysé. L’objet métonymique (les bottes) s’est substitué au personnage absent: Monsieur.
On pense ici au tableau de Van Gogh représentant une paire de chaussures. Ces chaussures ont fait couler beaucoup d’encre philosophique depuis Heidegger jusqu’à Derrida, mais toutes ces interprétations pointent le fait que le pathétique soulevé par la peinture vient de ce qu’elles nous font imaginer de la vie du possesseur de ces chaussures, à la fois absent du tableau et omniprésent.
De la même façon dans Les Paravents de Jean Genet, le colon Sir Harold surveille ses ouvriers algériens dans un champ. Toutefois pour continuer à exercer la terreur sur ses ouvriers et s’épargner la peine de les surveiller, il lui suffit de la présence de son gant :
« Habib : Vous partez déjà, Sir Harold ?
Voix de Sir Harold, de la coulisse : Pas tout à fait. Mon gant vous gardera.
Un merveilleux gant de pécari jaune arrive, jeté de la coulisse. Il reste comme suspendu dans l’air, au milieu de la scène.
Quoi de mieux que les bottes du maître ou son gant, symboles de la sa puissance et de sa violence, pour dire l’aliénation de l’esclave.
De même dans Les Bonnes de Jean Genet, Solange et Claire n’ont besoin que des robes de Madame, d’une sonnette et d’un gant de cuisine, pour se livrer avec délice et terreur aux jeux sadomasochistes de la domination et de la soumission, de l’orgueil et de l’humiliation. Il y a toujours de l’humain qui déborde de l’objet, particulièrement parce que les objets sont des surfaces sur lesquels nous projetons nos angoisses :
« Claire : Tu sais ce que je veux dire. Tu sais bien que les objets nous abandonnent.
Solange : Les objets ne s’occupent pas de nous.
Claire : Ils ne font que cela. Ils nous trahissent. Et il faut que nous soyons de bien grands coupables pour qu’ils nous accusent avec un tel acharnement. »
Conclusion qui n’en finit pas
Il semble donc que nous ayons à conclure tragiquement que tout nous trompe, tout nous ment, tout nous angoisse… Les objets ne sont pas plus objectifs, ni plus certains, que les paroles et nous devons adopter la leçon du scepticisme selon laquelle l’homme ne peut probablement pas atteindre la vérité. Il ne nous reste plus qu’à accepter le doute universel, notre incapacité à démêler le vrai du faux, et dire avec Montaigne : « Que sais-je ? », avec Calderón que « la vie est un songe », ou avec Shakespeare que le monde entier n’est qu’une scène de théâtre.
Toutefois, pour terminer sur une petite note d’espoir, ne pourrait-on penser que la vérité peut surgir, même du fond de la tromperie et de l’illusion ?
Dans Les Fausses confidences (1637), Marivaux renouvelle brillamment cette dialectique de l’illusion et de la vérité. Dans cette pièce, le valet Dubois manipule la riche veuve Araminte pour qu’elle tombe amoureuse de Dorante. Dorante, qui était auparavant le maître de Dubois, est un jeune homme de bonne famille ruiné. Il entre au service d’Araminte, dont il est amoureux, en qualité d’intendant pour se rapprocher d’elle. En vérité, Dubois n’a pas grand chose à faire pour qu’Araminte tombe amoureuse de Dorante, car dès le premier coup d’œil, Araminte est charmée par son nouvel intendant. Pourtant les machinations de Dubois sont nécessaires, car Araminte ne peut se permettre d’être amoureuse de son employé. Les conventions sociales de l’époque empêchent une telle transgression des barrières de classe. Il faudra donc beaucoup de ruse à Dubois pour obliger Araminte à cesser de se mentir à elle-même et accepter qu’elle aime Dorante. En digne héritier de Iago, Dubois manipule Araminte en ne lui disant que la vérité. Dès le départ, il lui annonce que son nouvel intendant est amoureux d’elle et il lui rappelle qu’elle se doit de le renvoyer sur le champ. Les « confidences » de la pièce ne sont donc pas « fausses » et trompeuses dans leur contenu, mais dans leurs intentions.
Araminte trouve toujours des prétextes pour garder son bel employé, et il faut donc que Dubois mette en place de subtiles machinations afin de rendre public l’amour de Dorante pour Araminte et forcer Araminte à voir clair en elle-même. C’est en effet le regard que les autres portent sur elle qui lui offre le miroir révélateur dont elle a besoin. Car c’est en se disant que les autres risquent de penser qu’elle est amoureuse, qu’elle prend conscience qu’en effet, elle est amoureuse :
« Araminte à Dorante: Vous donner mon portrait ! Songez que ce serait avouer que je vous aime !
Dorante : Que vous m’aimez, Madame ! Quelle idée ! Qui pourrait se l’imaginer ?
Araminte, d’un ton vif et naif : Et voilà pourtant ce qui m’arrive. »
Pour manipuler Araminte, Dubois a recours à deux objets : un portrait et une lettre prétendument écrite par Dorante et en réalité forgée de toutes pièces. Ces deux objets tombent comme par hasard entre les mains de qui il ne faut pas (des gens indiscrets qui en font grand bruit). Donc apparemment ils sont manipulés maladroitement, mais en réalité ils ont été manipulés avec beaucoup d’adresse puisqu’ils arrivent précisément entre les mains de ceux que visaient Dubois, tout en ayant l’air d’y être arrivé par un malencontreux hasard. Ces objets révèlent donc à toute la maisonnée l’amour de l’intendant pour sa maîtresse et la complaisance de cette dernière, qui se décide enfin à l’épouser.
J’avais commencé cet exposé par une digression philosophique, je conclurai par trois équations mathématiques :
Nous avons vu que dans la tradition théâtrale :
un vrai objet + manipulé de façon maladroite = illusion
(par ex. la lettre de Juliette qui arrive trop tard)
ou un vrai objet + manipulé avec des intentions trompeuses = illusion
(par ex le mouchoir de Desdémone.
Chez Marivaux
un faux objet + manipulé avec des intentions trompeuses = vérité
(c’est la fausse lettre de Dorante)
Donc, du fond même du mensonge et de la subjectivité des objets, peut surgir la vérité la plus objective! Ce qui sépare Marivaux de Shakespeare, c’est bien sûr Descartes, c’est-à-dire la confiance retrouvée dans les pouvoirs de la raison pour nous permettre d’atteindre la vérité, mais aussi l’idée que la certitude doit surgir du fond même du doute systématique et de la prise de conscience de nos illusions.